J'étais une nymphe, une toute petite, avec des yeux verts, et de grandes oreilles allongées, en pique.

J'avais des doigts de fée, avec, sur les ongles, des coccinelles.
Sur les lévres un sourire, le même, toujours, que des rayons transpercent l'air imperméable ou qu'il tombe des perles d'eau.
Mes dents seraient toutes petites, d'une grandeur surnaturelle, pointues.
J'avais des ailes, ou pas.
J'avais des cheveux raides, finement bouclés, en partie seulement. Ils étaient d'une couleur indefinissable, d'une couleur insondable, d'une couleur aérée comme la mer, évaporée comme l'air, entretenue comme un oiseau.
Ma peau serait douce comme du miel, comme du lait, comme de l'eau tricotée à la laine.
J'avais des larmes de paupières invisibles.
J'avais un océan de braise dans le regard.
J'étais une nymphe. Légère comme le temps, rapide comme le vent, éternelle comme le sommeil. Légère... aucune trace de pas, ni de vie. Rapide... un clin d'oeil et on ne verrait plus. Eternelle... toujours là. A travers l'Histoire, celle de la vie, celle de la mort.
J'étais invisible. D'une invisibilité rare. Comme les fées, et les anges. Les ange-fées. Les fanges.
J'étais capable de survoler la pleine lune, de courir voir Neptune. De sauter par-dessus le temps.
J'avais de la lumière brulante autour de moi, aux yeux gelés du Monde.
J'étais capable de sourire à tous bouts de bras, de parler à tous bouts de choux, de rire à tous bouts d'éclats.
Cet univers étais le mien, rien que pour partager, pour regarder, pour s'enrêver tout entier.